« Et il monta au ciel. »
Cette phrase fait, bien entendu, allusion à l'Ascension. Ce jour-là, le Christ ressuscité, après avoir enseigné les apôtres pendant quarante jours, les quitta visiblement : « Or, comme il les bénissait, il se sépara d'eux, et il était emporté au ciel » (Lc XXIV 51 ou McXVI 19), les Actes des Apôtres précisent même : « ils le virent s'élever et disparaître à leurs yeux dans une nuée » (AA I 9).
Malgré le pittoresque des miniatures médiévales montrant la scène avec les apôtres agenouillés devant un nuage d'où n'émergent plus que les deux pieds de Jésus, les mots « ciel », « ascension » ou « nuée » ne doivent pas nous faire illusion : il ne s'agit pas ici de précisions géographiques ou atmosphériques, Dieu ne réside pas dans nos nuages.
Et cependant les hommes ne peuvent se servir que des catégories de leur espace-temps pour désigner ce qui est au-delà : il est impossible de parler de l'éternité sans évoquer la durée (notion qui lui est pourtant étrangère) et d'orienter nos cœurs et nos regards vers Dieu sans lever la tête.
Il y a pour cela des raisons. Qui de nous – enfant déjà – n'a jamais été saisi d'un frisson devant l'immensité du ciel et n'est entré dans la contemplation de l'infini en essayant d'en imaginer les limites ? Plus encore que la mer dont nous connaissons les contours, le ciel, que l'homme n'a pas et ne pourra certainement jamais explorer totalement parle naturellement du mystère de Dieu.
D'autre part, dans l'observation du mouvement de la nature, de la croissance des plantes et des hommes, les civilisations ont toujours chargé de sens l'axe vertical : ce qui grandit s'oriente vers le haut, ce qui décrépit tend vers le bas. Les forces du mal appartiennent aux zones inférieures, et l'homme qui grandit – y compris moralement - va vers le « haut ». C'est ainsi que saint Paul exhorte ses correspondants : « Recherchez les choses d'en haut, là où se trouve le Christ ! » (Col III1).
L'Ascension affirme encore la royauté universelle du Christ qui tire vers le haut l'humanité entière. « Celui qui est descendu est le même qui est monté au-dessus de tous les cieux, pour remplir toutes choses » écrit saint Paul aux Ephésiens (IV 10), exprimant bien par ce « mouvement » que le Christ est venu visiter, racheter et habiter de haut en bas toute la Création : il n'est rien ni personne désormais qui soit si méprisable (« bas ») qui puisse dire que Jésus-Christ ne se soit penché jusqu'à lui (l'humiliation de sa Passion n'est pas si loin) et il n'est rien qui soit si haut qui puisse prétendre lui être supérieur.